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Représentants du personnel

La liberté de déplacement des élus du personnel doit se conjuguer avec les impératifs de sécurité de l’entreprise

Si les représentants du personnel sont libres de circuler dans les établissements de l’entreprise pour l’exercice de leur mission, ils doivent se conformer aux procédures d’accès mises en place par l’employeur pour des raisons de sécurité. C’est ce qu’illustre une décision de la Cour de cassation du 9 octobre 2019, dans un contexte de circulation dans des zones aéroportuaires.

Principe : liberté de circulation dans l’entreprise

Par principe, les représentants du personnel peuvent circuler librement dans l’entreprise, tant durant les heures de délégation qu’en dehors de leurs heures habituelles de travail (c. trav. art. L. 2325-11 ancien applicable au comité d’entreprise ; c. trav. art. L. 2315-14 applicable au comité social et économique).

L’employeur n’a pas le droit de restreindre cette liberté, que ce soit par une note de service ou une décision unilatérale, ou par le biais du règlement intérieur de l’entreprise.

En théorie, les élus ont donc accès à l’ensemble des locaux de l’entreprise dans lesquels des salariés travaillent : ateliers, usine, dépôts, magasins, etc. Cela leur permet notamment d’entrer en contact avec ces salariés.

Il faut tout de même que les locaux en question correspondent au périmètre d’exercice de leur mandat, notamment lorsque l’entreprise a plusieurs établissements. L’élu a alors une liberté de déplacement dans les établissements où il a été élu, tout en ayant la possibilité de se rendre au siège de l'entreprise pour les besoins de son mandat.

Encadrement de la liberté de déplacement justifié par des impératifs de sécurité

En pratique, si des zones sont potentiellement dangereuses pour la sécurité ou si des questions de sécurité ou de confidentialité limitent l’accès à certains lieux aux seules personnes habilitées, des restrictions à la liberté de circuler sont possibles.

L’employeur, en tant que garant de la sécurité de tous, peut imposer des procédures d’accès particulières à certains lieux de travail, lesquelles s’appliquent aux représentants du personnel comme à n’importe quel autre salarié. Une affaire ayant donné lieu à une décision de la Cour de cassation du 9 octobre 2019 en est une illustration concrète.

Les faits se déroulaient au sein de la compagnie Servair, filiale du groupe Air France.

La société possède 4 établissements aéroportuaires : Servair 1, Servair 2, Servair Siège et Servair Réunion.

Un salarié, membre élu du comité d’établissement de Servair 2 et du comité central d’entreprise, reprochait à son employeur une entrave à sa liberté de circulation dans l’ensemble de l’entreprise.

Il faut dire que l’accès aux établissements de l’entreprise est subordonné à la possession d’une part, d’un « badge rouge », délivré pour un aéroport particulier par le Préfet sur demande de l’employeur et d’autre part, d’un badge professionnel magnétisé donné par l’entreprise pour un établissement précis.

L’élu du personnel ne disposait que d’un badge rouge pour l’aéroport Charles de Gaulle et d’un badge magnétisé pour l’établissement Servair 2 où il travaille. Il réclamait à l’employeur la délivrance des badges d’accès aux autres établissements et de solliciter auprès du Préfet un badge rouge pour l’aéroport de la Réunion.

Face au refus de l’employeur de les lui accorder, l’élu a saisi le juge des référés en vue d’ordonner sous astreinte la remise de ces badges.

Il considérait que les formalités d’accès auxquelles il était soumis faute de les détenir constituaient une atteinte disproportionnée au principe de libre circulation.

Pour se rendre au siège, l’élu devait se faire inscrire sur un registre et laisser sa carte d’identité. Pour les autres établissements dont l’aéroport de la Réunion, situés en zone de sûreté à accès réglementé, l’élu devait se faire enregistrer au poste de sécurité et se déplacer sous escorte le temps de la visite.

Néanmoins, les juges du fond, approuvés par la Cour de cassation, ont considéré qu’il n’y avait aucune atteinte disproportionnée à la liberté d’aller et venir de l’élu et ont rejeté sa demande.

De fait, les précautions prises au sein du siège concernaient toute personne étrangère à celui-ci sans distinction, sachant qu’une fois entré le salarié était totalement libre de ses mouvements.

Quant aux formalités exigées pour l’accès à l’aéroport de la Réunion, situé dans une zone de sûreté à accès réglementé, elles n’étaient pas la marque d’une discrimination à l’égard du salarié ni l’instrument d’une entrave à ses activités syndicales, mais constituaient l’application des dispositions de l’arrêté préfectoral relatif aux mesures de police applicables sur l’aéroport de La Réunion.

Cass. soc. 9 octobre 2019, n° 18-13914 D

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